samedi 10 novembre 2007

WELLES



























A l'occasion de la diffusion de son oeuvre complète sur Cinema Classic, parlons un peu de ce bon géant...

Pourquoi bon d'abord ? Sans doute parceque bien qu'il soit dcté d'une personnalité colossale, il semblait trés peu égotique, très peu préoccupé de lui-même. Il avait la naîveté et la grandeur d'un Balzac. Il était obsédé seulement de cinéma, de son art, du film en train de se faire. Et s'il jouait dans ses films, c'était bien parceque c'était plus pratique et moins cher.

Décrié par les studios, afflublé d'une réputation de velléitaire dispendieux , tournant ses films malgré tout, dans des conditions insensées, bout de ficelle après bout de ficelle, il laisse une oeuvre magistrale...

Tout d'abord quel acteur! Voix de basse, puissante, profonde, sans aspérités, toute en velours... La Harley du comédien.

La voix qui depuis le texte de son homonyme anglais a jeté l'Amérique en panique sur les routes

Au cinéma, il se payait le luxe de pousser très loin ses compositions et de rester absolument crédible.

Quand on regarde le Welles jeune, dans Citizen Kane, on est frappé par la qualité de son interprétation. Il joue un homme mûr, ayant bien trente ans de plus que lui, et il est très vraisemblable, très juste. Il concilie parfaitement maquillage et jeu. De même que dans A touch of evil, il sait se rendre méconnaissable,dessiner puissamment une silhouette, sans que l'artifice ne soit grossier. Au cinéma, contrairement à ce que l'on pourrait croire, c'est un tour de force.

Il faut être un très grand acteur pour concevoir et porter le maquillage ainsi. Se vieillir est la chose la plus difficile à faire. Cela demande une conscience très fine. Les seuls ayant réussis sont Welles lui-même, et... Brando, qui dans le parrain, rajoute près de 25 ans à son âge, sans que l'on ne voit aucun bout de carton dépasser. La classe même...

Pensons en comparaison au jeu ridicule d'Al Pacino, dans le parrain 3, en cacochyme coiffé en brosse.

Ce qui frappe également dans le jeu de Welles, c'est le plaisir qu'il éprouve, il joue, il s'amuse. Il ronronne comme un chat, de pouvoir donner sa mesure, de lâcher sa faconde, d'inventer...

Rien de plus ludique et joyeux que le rapport de Wells au cinéma, il a quelque chose d'un enfant génial qui s'amuse avec un jouet magique et tente en épuiser les possibilités, multipliant de ce fait les trouvailles, jusqu'à en donner le tournis.

Quand on regarde un film de Welles, regarde-t-on le film ou sa mise en scène?

Welles détestait que l'on qualifie ses mise en scène de brillantes, elles devaient se couler au service de l'histoire et donc ne pas se voir. Mais de fait, elles se voient, elles étincellent , elles tonitruent même. Et d'ailleurs cela n'a aucune importance. son génie est si éclatant et généreux qu'il ne se laisse pas étouffer par la sophistiquation de ses propres circonvolutions. Film ou discours sur le cinéma? Peu importe, le résultat est grandiose et moderne pour l'éternité.

Comme il s'amuse, comme il jouit, il y a beaucoup de pureté et de gratuité dans son art, ce qui n'est pas pour rien dans l'impression de bonté dont je parlais plus haut.

Macbeth donc se jouait hier soir sur Cinéma Classic, sorte de cauchemard primitif, semblant se dérouler aussi bien au moment où peu à peu du monde ancien, archaïque et magique émerge la rationalité de la croix que dans une région souterraine de la conscience.

Welles, ébloui par la soleil de la tentation, s'enfonce dans le crime avec l'innocence d'un jeune homme.

Et c'est bien ainsi que je le vois, ébloui par quelque soleil noir, innocent et jeune, ...pour toujours...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Le plan séquence du début de "La soif du mal" donne la mesure de sa maîtrise technique, un peu au fond comme... Kubrick dans Shining, auquel d'ailleurs il accordait sa préférence pour la génération suivante.