mardi 23 octobre 2007

Le deuxième souffle d'Alain Corneau

d'après un roman José Giovanni.

C'est un film en chapeau avec flingues, costards et bagnoles...
Un film d'hommes et de beaux accessoires... Tourné semble-t-il le plus souvent en studio... Couleurs criardes, sentant bien l'artifice, la stylisation dirait-d'autres...

D'abord l'histoire, elle est superbe, de la belle ouvrage dont les artisans d'aujourd'hui ont perdus le secret. José Giovanni, nourri au lait amer des condammnés à mort savait de quoi il parlait et combien la taule peut démolir. C'est une histoire dorée à l'ancienne, construite comme autrefois, avec plein de beaux personnages et un fil conducteur implacable qui court à travers des rebondissements incessants: des évasions, des réglements de compte, un braquage, des arrestations...

Les dialogues, pleins du patois réel ou reconstitué du Paris truand, sonnent agréablement à l'oreille.

Le film.... deux heures trente-cinq... trop long...On baille par moment, on s'étire...Revenir à la table de montage ne serait pas du luxe.

La scène d'ouverture est très suprenante, très onirique, elle déboule sans prévenir sur le spectateur et l'aspire dans le film. Pas de musique, pas de générique,du silence jusqu'au moment où un corps s'écrase sur le sol avec un bruit sec.

Le personnage principal Gu (Daniel Auteuil)doit, pour s'évader, sauter d'un mur à l'autre en passant au dessus d'un gouffre. Il y arrive mais après un début si prégnant on devine qu'il est désormais en sursis et que toute la suite de son existence sera comme ce saut, suspendue au dessus du vide, sans qu'au bout du compte il ait le même succès.

On pourrait dire que ce film est un rêve, le rêve impossible de liberté de Gus. En fait, il est déjà mort au moment où il s'évade, détruit par la prison, sans argent, dégoûté par ce monde où les principes d'honneur n'ont plus cours.

Tragique, son destin est tragique, le polar est une tragédie en fait, merde alors!

Comme dans tous les films de genre, il y a de la violence, celle-ci se veut stylisée et ça n'est pas toujours réussi. La première scène de meurtre est ridicule, tant les tueurs étroits d'épaules, peu sûrs d'eux, semblants flotter dans leurs impers de figurants payés à la journée, sont peu convaincants. On a le temps de s'en rendre compte, elle dure très longtemps... Corneau aurait peut-être du piocher dans la violence sèche et imprévisible de Scorcese plutot que dans celle alambiquée du cinéma asiatique.

Le film de genre est poétique: de circuler depuis Melville jusqu'aux américains en passant par les asiatiques pour revenir ensuite chez nous, la poésie a perdu beaucoup d'innocence et a fini même par s'évanouir. Melville ne se savait pas poétique, c'est pour cela qu'il l'était.

Que reste-il donc? De grands numéros d'acteur. Encore une fois l'histoire est très belle et tout particulièrement ce moment où l'on colle à Gus une réputation de mouchard, une Némésis dont il ne peut se débarrasser et qui le dépouille de sa seule richesse, de sa raison de vivre: son honneur. Auteuil, plein de fureur et de souffrance, est superbe dans cette montée en puissance de la dernière partie du film.

Cela faisait très longtemps ( depuis Antoine et Sébastien) qu'on n'avait pas vu Dutronc aussi bon. Sa réserve naturelle, son humour retenu, sa gouaille feutrée, sa belle gueule ridée aux yeux verts collent très bien à son personnage de juge de paix impassible. Il a certes un jeu minimaliste mais pour fois, il ne nous sert pas le service minimum. Duval et tout particulièrement Melki sont impeccables...

Mais malheureusement,Il y a Michel Blanc! Mon Dieu qu'est-il devenu? Certes, il n'a jamais été transcendant dans les rôles dramatiques mais alors là, il a franchi un stade décisif vers l'effondrement.

Il cabotine autant que Gabin, toute dernière période, mais malheureusement il n'a rien de son immense talent. Le spectacle est donc insoutenable. Il déclame son texte, sentencieux, explicatif, moralisateur, tout puissant, ce n'est plus du jeu c'est de l'explication de texte. Balance ton texte, évacue le! A-t-on envie de lui crier! Oublie-toi!

Il nous fait de gros yeux derrière ses culs de bouteille pour nous expliquer combien il est humain. C'est l'école TF1, le jeu à la Navarro,qu'on construit depuis l'extérieur. On fait un personnage ominiscient, super humaniste et sans mystère. On donne une image rassurante et fausse de l'autorité et puis on devient l'ami des ménagères de plus ou moins cinquante ans. Le syndrome vieux con ...

Encore un acteur rattrapé par lui même, il ne courait pas bien vite pourtant.

Ah oui! Il y a la Belluci aussi, elle est décolorée, elle pleure beaucoup fait couler son rimmel, fume des cigarettes, donne de bon conseils à son homme qui ne les suit jamais, et passe de protecteur en protecteur... Oui, oui elle est belle, oui même décolorée...bon voilà quoi...

Un spectacle somme toute qui vaut vraiment le coup d'oeil sans arriver, selon moi, au niveau d'un très bon film. Il donne en tout cas très envie de lire le roman

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